Quand le fil et le lino se rencontrent, cela fait naître des étincelles… ou plutôt, créativité et beauté ! Depuis leur rencontre en 2019, Alaïs et Anaïde travaillent à quatre mains sur plusieurs projets mêlant couleur et poésie. En 2020, elles lancent leur atelier Wecandoo pour partager cette belle rencontre entre gravure et broderie avec le plus grand monde. Elles vous racontent.

Wecandoo : Hello Alaïs et Anaïde ! Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ?
Alaïs Raslain : Je suis illustratrice, de manière assez large. J’aime travailler avec différents outils en fonction des projets, des collaborations qui se montent. J’ai une pratique mixte entre l’encre, les crayons, le pastel, le dessin numérique, mais aussi la linogravure et la sérigraphie parfois. Je me suis formée à l’École Estienne à Paris, en me spécialisant en illustration scientifique, puis j’ai fini mes études à Bruxelles. Aujourd’hui, je travaille dans un atelier collectif de dix personnes à Montreuil. À l’origine, l’atelier s’est créé autour des métiers de l’image et du livre, avec deux imprimeurs lithographes, deux relieures et des arts graphiques.
Anaïde Fleig : Je suis artisan d’art relieure et brodeuse. Je me suis formée en Broderie à l’école La Source à Nogent sur Marne puis j’ai intégré un second diplôme des métiers d’art, mais cette fois-ci en reliure à Estienne à Paris. L’objectif de mon travail est de valoriser le mariage de ces deux savoir-faire. De cette rencontre est née une équation de mots : Broderie + Reliure = Brodure. Je collabore avec d’autres artistes et artisans et j’enseigne également ces deux métiers d’art dans des établissements. Aujourd’hui, j’ai choisi d’installer mon atelier en Auvergne.

Comment vous êtes-vous rencontrées ?
Alaïs : Anaïde était l’une des relieures installée dans cet atelier à Montreuil; l’atelier Danton. C’est dans la proximité de cet espace quotidien que nous avons eu envie de mêler nos pratiques et d’expérimenter ensemble un projet à quatre mains. Nous avons ouvert l’espace fin 2018 et notre collaboration a commencé fin 2019.

De quelle manière avez-vous collaboré ? Pourquoi ?
Alaïs : L’élan est d’abord venu d’Anaïde. Elle a proposé qu’on réponde ensemble à un appel à projet dans le cadre des Journées européennes des Métiers d’arts autour de la question de la réminiscence. J’ai proposé l’idée d’une correspondance croisée de cartes postales. C’était un sujet qui résonnait avec mes propres problématiques de travail et autour duquel je tournais depuis un moment. La question du paysage apparaissait aussi dans le travail d’Anaïde.
Je rentrais d’un voyage en Syrie à l’été 2019 et j’avais écrit des cartes pendant mon voyage que je voulais réinvestir. Anaïde avait le souvenir d’un voyage important en Irlande. On a réfléchi ensemble à l’aspect technique : le format, le support d’impression, l’intervention de la broderie et la finition encadrée. J’ai gravé les deux plaques. Le travail d’impression se fait ensemble, car c’est à ce moment que l’on travaille la couleur. Anaïde récupère ensuite les tirages sur tissu pour les broder et les monter sur carton avant de les confier à l’encadreuse.

Anaïde : Suite à cette première collaboration et ces premières images linogravées rebrodées, nous avons eu envie de poursuivre notre réflexion en cherchant à mieux comprendre quels étaient les enjeux de chacune des disciplines que sont la gravure et la broderie.
Nous avons donc réalisé une seconde série d’images intitulée “Paysage de saison”. En quatre saisons, le paysage est devenu le support d’une recherche chromatique sur les éléments de saison : l’eau, la terre, la verdure et la roche. Dans cette série, nous avons une fois sur deux intervertit nos rôles : Alaïs est devenue brodeuse et je suis devenue graveuse.

Ce qui nous a permis de mieux saisir la pratique de chacune et de nous pencher sur une troisième série intitulée “Marais salants” que nous présenterons au mois d’avril lors de notre première exposition commune.
Ces temps de création, nous ont permis d’entrevoir de nombreuses possibilités et propositions créatives : c’est ce qui nous a conduit à penser un stage alliant linogravure et broderie. Il s’agit bien sûr du stage relayé par Wecandoo !

Qu’est-ce que cette rencontre vous a apportée ?
Alaïs : Depuis la fin de mes études, je ressentais le besoin de trouver un partenaire de travail ; c’est aussi ce qui m’a poussé vers les ateliers collectifs. Non pas une associée, mais quelqu’un avec qui concevoir et mener une recherche particulière. Je trouve ça très intéressant que cela m’ait mené vers la broderie, qui est priori très loin de mon univers de travail. Nous avons deux cultures visuelles et professionnelles différentes et c’est vraiment un plus. Chacune apporte une technique et une rigueur qui lui est propre, ce qui rend notre duo très complémentaire.
Anaïde : Je suis tout à fait en accord avec ce que vient de dire Alaïs ! Nous exerçons chacune des pratiques très solitaires en dehors de nos interventions en milieu scolaire et institutionnel. Ces échanges permettent de sortir de notre cadre et d’envisager des appels à projets auxquels nous n’aurions pas pu répondre seule. Le travail collectif donne encore plus de sens à la création.

Une anecdote rigolote ?
Alaïs : Anaïde qui essaye de m’apprendre à broder ! J’ai mis des heures à faire et défaire mon paysage d’été, en soufflant énormément. Entre la broderie et la reliure, Anaïde possède toutes les qualités opposées aux miennes. Et je nomme toujours les points de broderie de manière approximative… Pourquoi le Point avant n’existe-t-il pas ?!
Anaïde : Ahahah ! Et bien pour une fois tu as raison, il existe !!

D’autres idées, envie de collaboration avec d’autres artisans ?
Alaïs : Si je devais faire la liste des métiers d’art et d’artisanat dont je me sens loin… ! Bien sûr, je pourrais travailler avec des imprimeurs taille-douce pour tester d’autres formats et d’autres types d’images. J’ai aussi l’idée depuis longtemps de collaborer avec un photographe pour travailler les bains argentiques couleurs. Et pourquoi pas aller vers le vitrail. Ce sont deux autres métiers propices à l’expérimentation de la couleur.
Anaïde : Ce que j’aime en associant la reliure et la broderie, c’est de me tourner vers le livre objet : ouvrir un livre doit être une expérience, un voyage et une immersion qui parachèvent et subliment la lecture de l’ouvrage. Aussi, je crois que je serai très attirée par des métiers d’art qui me permettraient de poursuivre cette réflexion autour de l’objet en continuant de bousculer l’emploi de la broderie comme simple décor : la céramique, le bois, le métal ?
Où est-ce qu’on peut retrouver vos ateliers et vos créations ?
Alaïs : Sur notre page Wecandoo, mon site et Instagram !
Anaïde : Pareil ! Et aussi mon site et sur Instagram.
Découvrez l’atelier animé par Alaïs et Anaïde